pour support seul
*2004 *
Durée 16′ 40
commande d’état
création le 14 mars 2004 Multiphonies – Maison de Radio France
A Aurélie
Nous rencontrons de nos jours encore les problématiques de Platon et surtout d’Aristote, posées voici bientôt 2500 ans, à propos de la nature de l’art et du rôle du créateur dans la Cité.
La création artistique (poièsis) est, selon Aristote, non pas seulement récit (diègèsis), mais « imitation » (mimèsis), permettant la purification (catharsis).
Par mimésis il faut entendre, non un simple décalque de la réalité, mais une sorte de re-création de cette « énergeia » qui constitue la vie.
Depuis le XIXe siècle, la photo d’abord, puis le cinéma et les médias – omniprésents au XXe siècle, qui nous abreuvent d’images et de représentations de toutes sortes -, tendent à rendre illégitimes les prétentions mimétiques de la peinture, voire de la musique. Le XXe siècle voit apparaître ces peintres qui refusent toute relation entre l’œuvre et le réel, dans les divers courants de l’abstraction, avec d’ailleurs une résurgence obstinée de la revendication de ‘l’art pour l’art’.
C’est cette réflexion et sa confrontation avec la musique au XXIe siècle, qui constituent ici mon point de départ. Cette oeuvre utilise en effet aussi bien des sons d’ « imitation » tirant leur valeur esthétique de la « réalité du monde » et des sons « images de création », qui re-créent l’énergie et les actes signifiants de la vie.
Mais reprenons l’opposition aristotélicienne entre mimèsis et diègèsis, reprise par la critique anglo-saxonne, qui oppose to show et to tell : mon œuvre est aussi un discours, qui évolue tel un périple et une odyssée parfois, dans l’historique de la mémoire, faite de relations, d’interactions, de rapports, de comparaisons, d’imitations, d’exemplifications, de sens re-créé, de vie.
Me refusant à louvoyer entre ces deux concepts, j’ai résolument privilégié « le rendu de l’impression reçue, dans une combinaison nouvelle » (Paul Klee).
La musique acousmatique dans son ambiguïté fondamentale et atavique, d’image et de réalité à la fois, de signifiant et d’abstrait entremêlés, s’est imposée à moi comme le langage adéquat pour tenter cette thématique délicate.